ACCIDENT EN TROTTINETTE
Quelles sont les règles à respecter lors de l’utilisation d’une trottinette électrique ? Que faire en cas d’accident ?
Un décret (D., 23 oct. 2019, n° 2019-1082.) publié au journal officiel le 25 octobre 2019 réglemente désormais l’utilisation des trottinettes électriques et plus généralement des monoroues, gyropodes, hoverboards … tous considérés par le code de la route comme entrant dans la catégorie des EDPM (Engins de Déplacement Personnels Motorisés).
Ce décret a comme objectif de « définir les caractéristiques techniques et les conditions de circulation des engins de déplacement personnel ».
Le décret défini un EDPM comme étant un véhicule « sans place assise,
conçu et construit pour le déplacement d’une seule personne et dépourvu de tout aménagement destiné au transport de marchandises, équipé d’un moteur non thermique ou d’une assistance non thermique »(article3 du décret).
Quelles sont les principales dispositions contenues dans ce décret ?
Ce décret impose aux conducteurs d’EDPM de :
- Ne pas transporter un autre passager.
- Ne pas circuler sur le trottoir (à moins que vous ne teniez en main votre EDPM).
- Ne pas dépasser la vitesse maximale autorisée de 25 km/h.
- Être âgés d’au moins 12 ans.
- Ne pas porter à l’oreille d’écouteurs, casques audio, tout appareil susceptible d’émettre du son, ou d’utiliser le téléphone tenu en main.
-Se vêtir d’un gilet de haute visibilité ou d’équipement rétro-réfléchissant en cas de circulation la nuit ou par visibilité insuffisante la journée (sachez que le port du casque n’est pas obligatoire mais recommandé)
-Ne pas pousser / tracter une charge ou se faire remorquer.
Depuis le 1er juillet 2020, Les EDPM devront être équipés de feux de position avant et arrière, de dispositifs rétro-réfléchissants (catadioptres), d’un système de freinage efficace et d’un avertisseur sonore.
Où pouvez-vous circuler ?
Ce décret distingue deux situations : en agglomération ou hors agglomération
En agglomération: vous devez circuler sur les bandes ou pistes cyclables.
- S’il y a une piste cyclable de chaque côté de la voie empruntée vous devez circuler sur celle située à droite de la route, dans le sens de la circulation.
- S’il n’existe pas de pistes cyclables, les conducteurs peuvent utiliser les routes dont la vitesse maximale autorisée est inférieure ou égale à 50 km/h (sans jamais rouler de front sur la chaussée) ou les aires piétonnes ou les accotements équipés d’un revêtement routier.
Hors agglomération:la circulation des EDPM est interdite, sauf sur les voies vertes et les pistes cyclables. Le port du casque et d’un gilet réfléchissant est obligatoire sur route hors agglomération.
Que ce soit en agglomération ou hors agglomération, l’autorité investie du pouvoir de police de la circulation, comme le maire, peut décider d’appliquer des règles particulières telles que :
- Autoriser la circulation sur le trottoir, à condition que vous respectiez l’allure du pas et n’occasionnez pas de gêne pour les piétons
- Autoriser la circulation sur les routes dont la vitesse maximale autorisée est inférieure ou égale à 80 km/h (avec port d’un casque attaché qui doit être attaché, d’un gilet réfléchissant ou un équipement rétro-réfléchissant, d’un dispositif d’éclairage complémentaire et circuler de jour comme de nuit avec les feux de position allumés).
-Stipuler ou vous pouvez stationner votre trottinette.
Existe-t-il une obligation d'assurance ?
L’assurance est
obligatoire pour les propriétaires de trottinettes électriques.
Vous devez souscrire une assurance responsabilité civile.
Cette assurance couvre les dommages que vous pouvez causer aux tiers et aux biens. Elle ne prendra pas en charge vos propres dommages corporels ou matériels.
Votre responsabilité civile Multi-risques Habitation n'intervient pas en garantie, en cas de sinistre, lors de l’utilisation de véhicules à moteur allant à plus de 6 km/h.
C’est toujours au propriétaire de la trottinette de souscrire cette assurance.
Pensez à étudier avec soin les garanties, montants assurés, franchises, exclusions du contrat d’assurance. La couverture de votre responsabilité civile va constituer la garantie de base qui comprendra aussi la garantie défense et recours.
Peuvent s’y ajouter des garanties optionnelles telles que l’individuelle accident, le vol suite à agression, les dommages avec collision.
Si vous louez des trottinettes électriques, il vous faut absolument vérifier que vous bénéficiez d’une assurance souscrite par les loueurs.
Outre les sanctions pénales encourues, le défaut d’assurance peut avoir des conséquences financières considérables pour vous si vous êtes responsable d’un accident grave :
Non seulement vous ne serez pas indemnisé de vos dommages matériels et corporels mais vous devrez en plus remboursez les montants que le FGA (Fonds de Garantie Automobile) aura versés à la victime.
Le Fonds de garantie automobile (FGA) est un organisme étatique qui indemnise les victimes d’accident de la route lorsque le responsable de l’accident n’est pas assuré ou a commis un délit de fuite et n’est pas identifié.
Quelles sont les sanctions en cas de non-respect du décret ?
Si vous ne vous conformez pas aux obligations édictées par le décret vous vous exposez aux amendes suivantes :
- Non-respect des règles de circulation ou si vous transportez un passager : 35 euros d’amende.
- Si vous circulez sur un trottoir sans y être autorisé : 135 euros.
- Si vous roulez avec un engin dont la vitesse maximale par construction est supérieure à 25 km/h : 1 500 euros d’amende avec possibilité de confiscation, d’immobilisation ou de mise à la fourrière de l’engin.
- Si vous ne portez pas un gilet ou un équipement rétro-réfléchissant la nuit ou le jour lorsque la visibilité est insuffisante : 35 euros d’amende
- Si vous poussez ou tractez une charge avec votre EDPM ou si vous vous faites remorquer : 35 euros d’amende
- Si vous êtes une personne de plus de 18 ans accompagnant un conducteur d’EPDM de moins de 12 ans, et exercez une autorité de droit ou de fait sur ce conducteur : amende de 135 euros.
- En cas de défaut d’assurance, l’article L 324-2 du Code de la route prévoit de lourdes sanctions pénales (amende pouvant aller jusqu’à 3750 €, peine d’emprisonnement, confiscation de la trottinette, travaux d’intérêt général…)
Quelles sont les conséquences du défaut d'assurance en cas de sinistre
En cas d’accident votre trottinette électrique (comme tout EDPM) sera assimilée à un véhicule à moteur et tout droit à indemnisation sera régi par la loi dite Badinter n° 85-677 du 5 juillet 1985 déjà mentionnée.
De ce fait rappelons quelques principes fondamentaux de cette loi :
Quel est son domaine d’application ?
Cette loi est applicable à l’indemnisation des victimes d’un accident de circulation (un événement fortuit involontaire) lorsqu’un véhicule terrestre à moteur (VTM) a causé un accident et quand un VTM est impliqué.
Cette loi s’applique et cela que l’accident ait eu lieu le long d’une voie ouverte à la circulation publique, dans un lieu privé ou sur une voie fermée à la circulation.
Par contre cette loi ne s’appliquera pas si les dommages résultent de violences volontaires.
Comment sont indemnisées les victimes ?
Cette loi pose le principe de réparation intégrale des dommages subis par les victimes tout en précisant en fonction de la nature de ces dommages que :
Pour les dommages corporels, les atteintes aux personnes :
Réparation intégrale des préjudices subis par la victime non-conductrice sauf si cette victime a commis une faute inexcusable ou volontaire (tentative de suicide).
Pour la faute inexcusable, celle-ci doit avoir été la cause exclusive de l’accident. Cette faute inexcusable a été définie par la cour de cassation dans un arrêt du 20 juillet 1987comme étant une « faute volontaire d’une exceptionnelle gravité, exposant sans raison valable son auteur à un danger dont il aurait dû avoir conscience ».
La faute inexcusable ne pourra pas être invoquée par l’assureur du VTM impliqué si la victime est vulnérable. Sont considérées comme vulnérables ou superprotégées les victimes de moins de 16 ans ou de plus de 70 ans, ou lorsque, quel que soit leur âge, elles sont titulaires, au moment de l’accident, d’un titre leur reconnaissant un taux d’incapacité permanente ou d’invalidité au moins égal à 80 %.
En ce qui concerne les enfants de moins de 16 ans, l’assureur sera tenu de les indemniser, sans pouvoir exercer ensuite un recours contre leurs parents.
La faute volontaire d’une victime vulnérable annule le droit à indemnisation.
Si la victime est conductrice, la faute qu’elle a pu commettre et qui a causé l’accident a pour effet de limiter ou de supprimer le droit à indemnisation.
Dommages aux biens :
La faute de la victime, qu’elle soit conductrice ou non, a pour effet de limiter ou d’exclure l’indemnisation des dommages aux biens qu’elle a subis.
Quel que soit la nature du dommage c’est à l’assureur du véhicule impliqué d’indemniser la victime.
Ces principes de base étant posés, appliquons-les à trois exemples fréquents qui surviennent lors de l’utilisation de trottinettes électriques :
Exemple A : Avec votre trottinette électrique, vous heurtez et blessez un piéton qui traversait à un passage piéton sans regarder et en téléphonant (chute du téléphone).
Les dommages corporels subis par le piéton seront intégralement indemnisés par votre assureur en vertu de la loi Badinter. En effet la victime n’a pas commis de faute volontaire ou inexcusable.
Par contre votre assureur pourra invoquer le manque de vigilance et le fait de traverser en téléphonant pour réduire voire supprimer le droit à indemnisation de la victime pour ses dommages matériels (téléphone portable, costume déchiré…)
Exemple B : Vous, en tant que conducteur d’une trottinette électrique, êtes percuté par un autre véhicule à moteur, une voiture qui est responsable.
L’indemnisation des dommages sera soumise à la loi Badinter. L’assureur de la voiture devra indemniser tous les dommages que vous avez subis qu’ils soient matériels ou corporels. L’assureur du véhicule impliqué devra vous faire une offre d’indemnisation provisoire ou définitive dans les huit mois qui suivent l’accident ou dans un délai de 3 mois à compter de votre demande d’indemnisation.
Si vous n’êtes pas satisfaits des offres d’indemnisation faites par les assureurs notamment pour les préjudices corporels vous pourrez, avec l’aide d’un avocat de votre choix, saisir le Tribunal Judiciaire.
Exemple C : Vous et votre trottinette électrique êtes responsables d’un accident ayant causé des dommages matériels à une voiture.
L’assureur de votre trottinette devra prendre en charge l’intégralité de la réparation des dommages au véhicule au titre de la garantie RC et cela une fois de plus dans le cadre de la loi Badinter.
Qu’en est-il des dommages que vous avez subis ?
La faute que vous avez commise supprime votre droit à indemnisation au titre de la loi Badinter. Par contre votre assurance trottinette pourra, en fonction des options que vous avez souscrites (individuelle accident, dommage avec collision), indemniser vos préjudices matériels et corporels avec application des franchises et des limites propres à votre contrat d’assurance.
Exemple D : Vous, en tant que conducteur d’une trottinette électrique, êtes percuté par un autre véhicule à moteur, une voiture qui est responsable mais qui prend la fuite avant que vous ou des témoins ayez pu relever sa plaque d’immatriculation.
Si l’auteur de l’accident a pris la fuite (ou n’est pas assuré), il convient de s’adresser au Fonds de Garantie des Assurances Obligatoires de Dommages (FGAO) pour obtenir un dédommagement (art. L. 421-1 du Code des assurances). Votre avocat pourra vous assister pour saisir le Fonds.
Exemple E : Vous circulez à trottinette électrique et êtes impliqué dans un accident mais vous n’êtes pas assuré. Deux cas de figure possible :
Si vous n’êtes pas responsable vous serez indemnisé par l’assureur du tiers fautif. Mais vous n’aurez pas par définition le soutien d’un assureur en matière de défense recours ou d’aide au stade des expertises médicales. Le fait de ne pas être responsable ne vous mettra pas à l’abri de poursuites au pénal pour défaut d’assurance.
Si vous êtes responsable et non assuré alors comme déjà évoqué non seulement vous ne serez pas indemnisé de vos dommages matériels et corporels mais vous devrez en plus remboursez les montants que le FGA (Fonds de Garantie Automobile) aura versé à la victime et de surcroit vous vous exposez à sanctions pénales (amende pouvant aller jusqu’à 3750 €, peine d’emprisonnement, confiscation de la trottinette, travaux d’intérêt général…)
Exemple F : Vous chutez de votre trottinette sans implication d’un tiers
L’indemnisation se fera au travers de votre assurance trottinette si vous avez souscrit l’option couvrant les dommages notamment corporels subis.
Démarches en cas d’accident avec votre trottinette électrique
Sur le lieu de l’accident
- En cas de dommages matériels faites un constat amiable.
- Si des personnes sont blessées: appelez la police pour qu’elle puisse dresser un procès-verbal.
- Recueillez des témoignages et prenez des photos de l’accident, des véhicules impliqués, du site, des feux, panneaux de signalisation
- Recueillez les coordonnées des différents protagonistes.
Déclaration aux assureurs
Faites une déclaration préalable dans les 5 jours à compter de la date de survenance de l’accident (avec copie du constat amiable et du procès-verbal). Expliquez avec clarté les circonstances de l’accident ainsi que ces conséquences.